17/10/2025
ZEBRUS EXPRESS : la bête est dans le bus !
Chronique pour un été ordinaire - le prochain été bien sûr !
À partir du 2 juillet, et jusqu’au 27 août 2026 (sous réserve de canicule, effondrement social ou attaque de cigognes migratoires), une navette quotidienne reliera la gare de XXX au très renommé parc zoologique ZEBRUS, joyau bétonné de l’imaginaire animalier local.
Plusieurs arrêts dits "stratégiques" (si, si) jalonneront le parcours :
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Place des Grands Hommes (dont aucun ne prend le bus)
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Office de Tourisme (fermé entre midi et 14h30)
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La Cathédrale (photo obligatoire pour prouver qu’on a "fait" la ville)
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L’EHPAD (point de départ ou d’arrivée selon l’espérance de vie)
Tarif unique : 2,25 €.
Soit 0,012 € le rugissement entendu, ou 0,35 € la girafe entre deux panneaux publicitaires.
Horaires optimisés pour :
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Les familles en sandales qui cherchent du frais et du vivant
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Les Allemands sans voiture mais avec casquette
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Les petits-enfants des GI qui cherchent leurs racines entre deux cornets de glace
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Et les retraités de plus de 82 ans (offre valable jusqu'à épuisement des sièges ou des participants)
- On se prépare !
11:43 Publié dans Chronique, Impertinences | Lien permanent | Commentaires (0)
13/07/2025
Marché nocturne
Ah, voilà un mystère de la géographie estivale française qu’il fallait enfin oser affronter :
le stand de katanas en plein marché nocturne de bord de mer.
Oui, entre la planche à découper pyrogravée, les savons à la lavande, et le vendeur de sacs tibétains made in Taïwan, se dresse imperturbable le maître d’armes en polo Ralph Lauren contrefait, vendant ses sabres de samouraï, exposés sous néon, à côté de quelques nunchakus en mousse pour enfants — parce qu'on est là aussi pour transmettre.
Et tu te demandes, épongeant ton front moite avec un flyer de pizzéria :
"Mais QUI achète un katana à Fouras ?"
Eh bien, probablement un homme en claquettes-chaussettes, qui se sent pousser une âme de ronin charentais, et qui, après deux mojitos trop sucrés au bar de la plage, s’imagine prêt à trancher l’air salin au nom du bushidō du PMU.
C’est ça, la France de juillet-août :
– On ne lit pas Mishima, mais on achète la lame.
– On ne comprend pas bien les règles du Go, mais on repart avec un shuriken "pour les gamins".
– Et on se dit que peut-être, entre deux merguez, on méditera sous la pleine lune en découpant du melon au sabre de Tōkyō.
Parce que dans le fond, le katana de marché nocturne, c’est l’ultime fantasme du vacancier de province :
Un peu d’exotisme, un peu de violence contenue, et surtout une excuse pour dire "regarde, j’ai payé ça 30 euros, c’est un vrai, y a le certificat !"
Et le pire…
C’est qu’on l’imagine, ce type, revenu chez lui à Poitiers, le katana exposé au mur du salon, entre la photo du chien décédé et un masque africain acheté à Sète.
Il le regarde parfois, le soir, après le cassoulet, et il murmure, ému :
"Un jour, s’il le faut, je me lèverai."
20:08 Publié dans Chronique, Impertinences | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marché, katana, tong
"Recherche restaurant désespérément"
"Recherche restaurant désespérément"
Un soir comme tant d’autres.
L’envie soudaine de sortir.
Un petit resto sympa, sans prétention, pas trop cher, pas trop loin, pas trop gras, pas trop bondé, pas trop m’as-tu-vu.
Bref : une chimère moderne.
Je tape dans Google : "restaurant sympa ce soir dans les environs".
Je reçois 137 propositions.
La carte de France s’allume comme une guirlande de Noël sous Xanax.
D'abord, le resto français, avec nappe à carreaux et bidoche baignant dans la sauce.
Le genre d’endroit où le cuisinier confond fond brun et mazout,
et où le serveur t’explique que le magret, s’il est dur comme une semelle, c’est "parce qu’il est élevé en plein air, Monsieur."
Ensuite, le restaurant à fondue, planté fièrement à 200 mètres de la Loire.
Parce que rien ne dit "authenticité alpine" comme un caquelon au bord d’un fleuve vaseux. Le fromage industriel y bouillonne dans une ambiance de spa à raclette.
Tu ressors parfumé à l'emmental fondu jusqu’au slip.
Puis, bien sûr, le gastronomique.
Ambiance feutrée, menu en cinq syllabes, et tarif en cinq chiffres.
Le pain est tiède, la serveuse te tutoie à 120 balles le menu "Instant Végétal", et la purée de betterave te regarde dans l’assiette comme une œuvre conceptuelle.
Tu manges l’équivalent calorique d’un Tic Tac, et tu ressors avec la dalle d’un docker.
Plus loin, le faux chinois :
glutamate, nouilles surgelées, déco en bambou de chez Gifi.
Le cuisinier s'appelle Bernard et vient de Vierzon.
Mais l’enseigne s’obstine à t’annoncer "Délices d’Orient", en rouge fluo, avec un dragon pixelisé.
L’indien, lui, est aussi fade qu’un discours de Miss France.
Du poulet Tikka sans âme, du riz au safran sans safran, et un lassi tiède qui sent la salle d’attente.
C’est Gandhi, version micro-ondes.
Reste les grands temples de la cuisine asiatique, plantés en zone industrielle,
dans des ZAC, des ZAE, des ZIC, des ZEP… et probablement des ZOB, vu la gueule du parking.
Des cathédrales du buffet libre, 500 places assises,
des sushis qui brillent dans le noir, des nems à la sauce algérienne,
et un wokman qui fait plus de bruit que le métro de Shibuya.
Tu payes au poids, tu dînes au pas de course.
Le nirvana du mange-vite-et-oublie.
Et puis les autres :
Kebab, Baoab, Toubab,
bistrot vegan qui vend des graines à 19€,
food court bio tenu par des hipsters qui prononcent "houmous" avec une majuscule.
Alors je ferme mon ordi.
Je regarde mon frigo.
Je souris.
Je me fais des pâtes au chorizo.
Pas de supplément sauce, pas de supplément bruit,
pas de parking à trouver, pas de sommelier qui me dit "ce petit vin naturel est une aventure" comme si j’allais faire un trek dans les Cévennes.
Non.
Juste moi, mes pâtes,
et le chorizo — piquant, fidèle, discret.
Le vrai luxe.
19:41 Publié dans Chronique, Impertinences | Lien permanent | Commentaires (0)

